Comment les multinationales se servent du changement climatique pour imposer leur futur modèle agricole

Basta Mag – le 23 novembre 2015 :

arton5199.jpgCAPITALISME VERT

Les émissions de gaz à effet de serre liées au secteur agricole sont dans le collimateur des gouvernements. Un nouveau concept émerge : « l’agriculture climato-intelligente », en vue de produire plus et mieux… Dans les arènes des négociations sur le climat, les multinationales sont dans les starting-blocks pour promouvoir des « engrais intelligents » et des plantes génétiquement modifiées tolérantes à la sécheresse. Alors que l’agro-industrie est en passe de remporter la bataille sur l’agro-écologie, des chercheurs et des ONG tentent de renverser la donne. Enquête.

Près d’un quart des émissions mondiales de gaz à effet de serre seraient imputables à l’agriculture [1]. Un chiffre inquiétant… et dérangeant. Car il englobe tous les systèmes de production, de l’agriculture « conventionnelle » à l’agriculture biologique, de l’élevage hors-sol à l’élevage pastoral, des monocultures industrielles aux petites fermes en polyculture-élevage. Alors que la responsabilité des agriculteurs dans le réchauffement climatique se retrouve pointée du doigt, des acteurs agro-industriels tirent profit de ces amalgames pour reverdir leur image.

C’est le cas de Yara International, une entreprise norvégienne leader des engrais de synthèse, qui a vendu plus de 26 millions de tonnes d’engrais dans 150 pays l’an passé [2]. Le groupe se lance dans l’« intensification durable » ! L’idée ? Accroître le recours aux engrais chimiques augmenterait les rendements, et permettrait ainsi d’utiliser moins de terres agricoles et d’éviter les émissions liées à l’expansion des cultures sur les forêts. Ce raisonnement n’a pas convaincu l’ONG agricole Grain, qui, dans un nouveau rapport, souligne que les fabricants d’engrais figurent « parmi les principaux ennemis du climat au niveau mondial ». Le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) estime que pour 100 kilos d’engrais azoté appliqué sur les sols, un kilo se retrouve dans l’atmosphère sous forme d’oxyde nitreux (N2O), un gaz à effet de serre 300 fois plus puissant que le CO2 ! « Leurs produits pourraient être responsables de près de 10 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre (GES), sans parler des dommages entraînés pour les cours d’eau, les sols et la couche d’ozone », ajoute l’ONG. Un décalage entre pratiques et discours qui vaut à Yara une nomination au Prix Pinocchio du climat 2015 [3].

Agriculture climato-intelligente : un concept dangereux

La FAO, l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture, n’est pas de cet avis : elle considère l’intensification durable comme une solution « intelligente » pour faire face aux changements climatiques. En dépit des critiques formulées par les ONG, Yara fait partie des multinationales qui ont récemment rejoint l’Alliance mondiale pour l’agriculture climato-intelligente (Gacsa [4]), qui regroupe des pays, des ONG de conservation environnementale, des universités et des centres de recherche. Le concept d’« agriculture climato-intelligente » – climate smart agriculture, en anglais – repose sur trois piliers. Il s’agit d’abord, explique la FAO, d’augmenter la productivité agricole pour faire face à l’augmentation de la population mondiale, et « d’adapter les systèmes agricoles » face aux événements climatiques extrêmes amenés à se multiplier, tels que les inondations ou les sécheresses. Troisième pilier, la mise en œuvre des pratiques agricoles qui « atténuent » les émissions de gaz à effet de serre. np_climate_cmart_farm.jpg

Basta ! s’est plongé dans le guide des initiatives « climato-intelligentes » [5]. Au menu des remèdes miracles, le colza tolérant aux herbicides, qui permettrait d’utiliser « moins de produits chimiques de moins en moins toxiques », ou bien encore le maïs tolérant à la sécheresse, qui augmenterait les rendements « de 20 à 30 % » – ce que conteste par ailleurs l’association Inf’Ogm. En septembre 2015, une centaine d’organisations ont signé un appel qui reproche au Gacsa de ne pas préciser les critères qui permettraient de définir ce qui peut, ou pas, être qualifié de « réponse intelligente » au changement climatique. « Il n’y a aucun travail sur la définition des critères de l’agriculture climato-intelligente, car définir reviendrait à exclure des pratiques agricoles », souligne Jeanne-Maureen Jorand du CCFD-Terre solidaire. Or, sans norme ou critères d’exclusion, ce concept est tout simplement dangereux. »

Développer l’agriculture industrielle au nom de la lutte climatique

« La définition de l’agriculture climato-intelligente était une ligne rouge pour le gouvernement français », relate Jeanne-Maureen Jorand. Lors du lancement du Gacsa, Annick Girardin, secrétaire d’État au Développement et à la Francophonie, avait ainsi mis en garde sur les risques de certaines pratiques, comme les OGM ou le recours aux agrocarburants : « Il nous faut veiller à ne pas tout cautionner au nom de la lutte contre le dérèglement climatique, et à bien nous assurer que les solutions que nous mettrons en place ne créent pas plus de problèmes qu’elles n’en résolvent », déclarait-elle en septembre 2014. Le gouvernement français a finalement décidé de s’engager dans le Gacsa aux côtés de vingt et un autres pays, expliquant auprès de l’AFP vouloir « être dedans plutôt que dehors pour avoir une influence »stephane_le_foll_intervention_csa_2015.jpg

C’est aussi la position de certains organismes de recherche, comme le Cirad, Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement [6]. « La définition n’est pas assez rigoureuse, ce qui laisse les portes ouvertes à différentes manières d’intensifier et à la vision d’une agriculture plus industrielle, observe Emmanuel Torquebiau, chargé de mission « changement climatique » au Cirad. On se bat à l’intérieur du Gacsa pour faire valoir notre point de vue. »

Danone et Walmart, nouveaux défenseurs de l’agriculture intelligente

« On propose des recherches scientifiques permettant de vérifier ce qui relève de l’agriculture climato-intelligente écologique ou du greenwashing, explique Emmanuel Torquebiau. Il s’agit de rester dans ces réseaux pour y mettre de la science, car il y a beaucoup de discours de façade. » Le Cirad, principalement à l’œuvre dans les pays du Sud, préconise des pratiques agro-écologiques, comme la couverture permanente du sol, afin d’augmenter la matière organique, de piéger du CO2 et de limiter le recours aux engrais. L’Inra, Institut national de la recherche agronomique, également membre du Gacsa, encourage l’agroforesterie en cultivant, par exemple, « des céréales sous les arbres pour mieux résister à la sécheresse ».

Mais la bataille entre agro-écologie et agro-industrie est fortement déséquilibrée au sein de l’alliance, celle-ci comptant une forte représentation du secteur privé. Outre des membres actifs, comme Danone, l’Alliance compte en son sein le Conseil mondial des entreprises sur le développement durable (WBCSD en anglais), qui regroupe de très nombreuses multinationales. Selon les ONG, environ 60 % des membres du Gacsa seraient issus du secteur privé des engrais [7]. Emblématique de cette stratégie, Walmart, le leader mondial de la grande distribution, veut réduire ses émissions, en associant ses fournisseurs à des programmes d’« optimisation des engrais » élaborés par Yara [8] ! 10_ir_careers.jpg

Concrètement, les plantations d’oranges de PepsiCo, entreprise fournisseur de Walmart, doivent désormais recourir à des engrais azotés portant la marque « faible empreinte carbone » de Yara. Censés entraîner moins de ruissellement, ces engrais visent à « éviter une situation dans laquelle les aliments issus de l’agriculture biologique seraient les seuls à bénéficier d’un label dans le cadre de la lutte contre le changement climatique » (sic), explique Yara.

La « finance carbone » à l’assaut de l’agriculture

Invité en mars dernier aux troisièmes rencontres de l’agriculture climato-intelligente, à Montpellier, le ministre de l’Agriculture Stéphane Le Foll a insisté sur « les puits de carbone » que constituent les sols. « Plus vous augmentez la matière organique de vos sols, plus vous stockez des gaz à effet de serre, a-t-il expliqué. Et, en plus, on augmente les rendements ! » Le gouvernement a lancé un programme de recherche international intitulé « 4 pour 1 000 ». En améliorant de 0,4 % par an la capacité de stockage en carbone des sols à travers la mise en œuvre de certaines pratiques agricoles – non définies pour l’instant –, ce projet ambitionne d’absorber et de stocker 75 % des émissions de gaz à effet de serre ! Et de restaurer, en plus, les terres dégradées, notamment en zone aride et quasi aride du continent africain.

« Au vu des chiffres que j’ai annoncés, précise Stéphane Le Foll, il y a un enjeu qui en vaut largement la chandelle, qui mériterait qu’on finance aussi, à travers le marché du carbone, les techniques, les évolutions, les modèles de production de demain. » S’il aboutit, le projet 4 pour 1 000 pourrait ainsi devenir un outil de compensation des émissions de gaz à effet de serre pour les entreprises privées, à l’instar du projet d’Air France dans les forêts de Madagascar (lire notre enquête). « Un rôle central est confié à la finance carbone et aux investisseurs financiers », dénoncent l’association Attac et la Confédération paysanne dans une note commune sur l’agriculture climato-intelligente. « Ces dispositifs ont pourtant démontré leur inefficacité et leur incapacité à générer une transition post-carbone. Il n’y aucune raison qu’il en soit autrement dans l’agriculture. »

L’agriculture climato-intelligente, nouvel avatar du greenwashing ?

(…) les organisations de la société civile demandent aux gouvernements de ne pas reconnaître cette « agriculture climato-intelligente » comme solution possible au changement climatique. Une position partagée par la secrétaire d’État au Développement et à la Francophonie, qui a insisté en septembre 2014 pour que Gacsa « ne vienne pas interférer et se substituer aux négociations climat ». Contacté par Basta !, le ministère de l’Agriculture souligne que l’agriculture climato-intelligente pourrait figurer dans « l’agenda des solutions », un texte rassemblant les engagements des acteurs non étatiques et qui pourrait figurer aux côtés de l’accord négocié à Paris.

« L’initiative 4 pour 1000 figure déjà dans cet agenda », remarque Jeanne-Maureen Jorand. Une table ronde des technologies bas carbone (LCPTI), portée par le Conseil mondial des entreprises pour le développement durable et appuyée par le gouvernement français, apparaît aussi dans l’agenda. Parmi les invités de cette table-ronde figure d’ores et déjà… Monsanto ! « C’est une catastrophe, réagit Jeanne-Maureen Jorand, le gouvernement est en train d’institutionnaliser cet agenda des solutions et d’entériner la voie de l’agriculture climato-intelligente sans aucun critère et sans aucune discussion. » Interrogé à ce sujet, le ministère de l’Agriculture n’a pas souhaité répondre.

TOTAL SE RAPPROCHE DES BARRAGES D’OSSAU

Total va racheter pour 2,5 milliards d’euros (dette comprise) Direct Energie, premier opérateur électricité/gaz alternatif du marché français avec 2,6 millions de clients.

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Total acquiert 74% de Direct Energie pour 1,4 milliard $

Le pétrolier français Total acquerra bientôt Direct Energie, le troisième plus grand fournisseur d’électricité et de gaz. Concrètement, le géant prendra possession de 74% de l’actionnariat de la compagnie, au prix de 1,4 milliard €.

L’opération qui sera finalisée d’ici la fin de l’année 2018, « s’inscrit dans la stratégie du groupe d’intégration de l’ensemble de la chaîne de valeur du gaz-électricité», a affirmé à ce propos, Patrick Pouyanné, le président-directeur général de Total. Avec cette nouvelle acquisition, le géant pétrolier qui est entré dans une phase de diversification de son portefeuille, avec notamment l’intégration des énergies renouvelables, multiplie par 7 sa part du marché électricité en France qui est désormais de 7%. La nouvelle entité s’est en outre, fixé pour objectif d’atteindre un portefeuille de 6 millions de clients en France et 1 million en Belgique d’ici 2022. 

TOTAL RACHETE LAMPIRIS.jpgDirect Energie rejoint ainsi le rang des entreprises électriques acquises par Total. Le pétrolier a en outre, pris des participations dans EREN Renewable Energy le fournisseur d’énergies renouvelables, SunPower le fabricant américain de matériaux d’énergie solaire, GreenFlex un spécialiste français de la transition énergétique, Lampiris le fournisseur belge d’électricité et dans United Wind, une compagnie américaine spécialisée dans l’éolien. (Lien source)

Le pétrolier est déjà présent sur ce marché en France et Belgique depuis le rachat de Lampiris en 2016. Il veut passer de 7 à 15% de parts de marché en France en 5 ans. Il lui faut encore choisir quelle marque il va conserver, le groupe ayant lancé Total Spring à l’automne. En achetant Direct Energie, Total pourrait se retrouver prochainement concessionnaire des unités hydroélectriques de la vallée d’Ossau pour lesquelles Direct Energie était candidat.

AVEC DIRECT ENERGIE, TOTAL PASSE « DE LA POMPE à LA PRISE »

Direct-Energie-768x623.jpg(Lien source) Au-delà de bons trimestriels, les opérateurs sont également très friands d’annonces de fusion-acquisition donnant lieu à des « primes » d’acquisition sympathiques. La dernière en date ? L’opération de Total sur Direct Energie. En effet, face à des perspectives de croissance incertaines, et probablement moins florissantes que ce que les gérants prétendent face aux médias (en « off », ils se montrent beaucoup plus prudents), l’un des axes de stock picking privilégiés consiste à identifier les cibles d’une possible opération de croissance externe… Autrement dit, de concentration.

Total rachète Direct Energie

(…) C’est donc Total qui a fait l’actualité ce mercredi, avec une offre de rachat amicale de près de 2 Mds€ immédiatement saluée par la communauté financière. La proie n’est autre que Direct Energie. Le protocole d’accord de rapprochement a été approuvé à l’unanimité par le conseil d’administration de la cible. Qu’en est-il ? L’opération passe d’abord par l’acquisition immédiate par Total de 74,3% du capital de Direct Energie ; sur la base de 42 € par action (+30% de prime !) pour un montant d’environ 1,4 Md€. S’en suivra une offre publique obligatoire pour éponger le reliquat détenu par les minoritaires (vous et moi). Ce qui coûtera grosso modo à Total 0,5 Md€ supplémentaire pour monter à 100% du capital.

(…) Ainsi avec Direct Energie, Total s’affranchit de sa dépendance au pétrole tout en atténuant l’image de producteur/raffineur qui colle à l’enseigne.

TOTAL.jpgCar, dans sa dot, la cible ramène 2,6 millions de clients supplémentaires (actuellement 1,4 million) et une capacité de 1,35 gigawatt qui viennent s’ajouter aux 900 mégawatts de Total.

C’est symbolique eu égard aux capacités d’EDF, mais cette activité n’en est qu’à ses débuts. Total a déjà beaucoup investi dans l’éolien mais, en termes d’offre de mégawatts, cela reste anecdotique. Direct Energie offre à Total un accès à l’hydroélectricité et à deux

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TOTAL & la Green tech

centrales thermiques à « Cycle Combiné » fonctionnant au gaz naturel (à Bayet dans l’Allier et Marcinelle en Belgique) d’une capacité d’environ 800 MW. Les mégawatts restants se répartissent entre barrages, éoliennes terrestres, énergie solaire et biogaz, en France métropolitaine et dans les DOM-TOM.

Le patron de Total, Patrick Pouyanné, espère 300 M€ de synergies… Ce n’est peut-être pas tant dans la production que réside la pertinence de cette opération mais bien dans la force de frappe commerciale que lui apporte Direct Energie… et c’est bien l’un des atouts majeurs de cette concentration.

(…)  à l’issue du processus de rapprochement, il n’y aura plus « qu’une seule marque », qui reste encore à définir.

« Un potentiel de croissance considérable »

b978947753z.1_20160615082847_000gm37128q4.1-0« Il y a encore la moitié des gens qui ne savent pas que l’on peut changer de fournisseur, donc il y a un potentiel de croissance considérable », a souligné Xavier Caïtucoli, PDG et cofondateur de Direct Energie,. « Si vous ajoutez à cela les questions qui sont posées autour des tarifs réglementés, ma conviction est que les parts de marché vont se redistribuer dans les années qui viennent et le troisième acteur français aura son mot à dire ».

Le gouvernement envisage en effet une fin progressive des tarifs réglementés

du gaz, avec leur extinction à l’horizon 2023 pour les particuliers. Les tarifs réglementés de vente (TRV) de l’électricité appliqués par EDF à plus de 27 millions de consommateurs en France ont aussi été attaqués en justice par des fournisseurs alternatifs.


L’AVENIR DES BARRAGES HYDROÉLECTRIQUES INQUIÈTE

Béarn : le PCF manifeste contre la privatisation de l’hydroélectrique

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Le Parti communiste français du 64 a organisé ce samedi matin un mouvement pour mettre sous « protection citoyenne » l’usine hydroélectrique d’Asasp-Arros, en présence de Marie-Pierre Vieu, députée européenne PCF et d’Olivier Dartigolles, porte-parole national du PCF. (Lien source)

Devant « les financiers qui lorgnent sur cette richesse qu’est l’eau », ils entendent éviter « une spoliation du patrimoine hydroélectrique du pays ».

LA JUSTICE ANNULE LE PARC ÉOLIEN INDUSTRIEL DE LANOUÉE, DANS LE MORBIHAN

Reporterre – le 12 juillet 2017 :

En achetant la forêt de Lanouée en 2007, la multinationale Louis-Dreyfus est devenue le premier propriétaire forestier privé en Bretagne. Son but ? Un parc éolien industriel. Mais la justice a annulé l’autorisation.

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- ActualisationMardi 11 juillet 2017Le tribunal administratif de Rennes a annulé les permis de construire de 16 éoliennes en forêt de Lanouée (Morbihan), deuxième massif forestier breton, invoquant la richesse écologique du milieu et les dimensions « hors d’échelle » du projet.

La justice a tranché, a-t-on appris le 11 juillet : sous réserve d’un éventuel appel, il n’y aura pas de parc éolien en forêt de Lanouée (Morbihan). Le projet, porté par la société Les Moulins de Lohan, filiale du groupe canadien Boralex, visait à construire 16 éoliennes d’une emprise au sol de 16 ha pour un périmètre total de 331 hectares et une puissance installée de 50 MW.

Le juge administratif a annulé les permis de construire délivrés en février 2014 par le préfet du Morbihan, suivant l’avis du rapporteur public et du juge des référés. Il a également annulé l’autorisation d’exploiter, de défricher, et de déroger à l’interdiction faite par le Code de l’Environnement de détruire des espèces protégées.  Source : Ouest-France


- Article paru sur Reporterre le 24 juin 2015 sous le titre :

Quand une multinationale s’achète une forêt pour en faire un parc éolien industriel

La forêt de Lanouée (Morbihan) est le second ensemble forestier breton par sa taille. À ceci près que les 7.000 hectares du premier, la forêt de Paimpont (Ille-et-Vilaine), sont divisés entre une multitude de propriétaires quand les 4 000 hectares de Lanouée sont aux mains d’une seule société, la multinationale Louis-Dreyfus. Avec ses 30.000 salariés, le groupe opère au sein de 53 pays dans divers domaines : le négoce de grain, le transport maritime, la distribution d’électricité, etc.

Éolien international

C’est en 2007 que la multinationale acquiert la forêt de Lanouée via sa filiale Ressources Forestières, afin d’asseoir sa stratégie de développement des énergies renouvelables. Après l’achat d’un massif en Grande-Bretagne et des négociations en Suède, « cette acquisition est une pièce importante d’un projet européen pour le groupe », expliquent alors François de Broucker et Bernard Hidier, responsables de Ressources Forestières France, au quotidien régional Le Télégramme.

Le projet se précise lors de l’élaboration du schéma régional « climat air énergie » à partir de 2010. La maitrise d’ouvrage est assurée par la société Les Moulins de Lohan, filiale à 100 % de Ressources forestières, elle-même filiale à 100 % du groupe Louis-Dreyfus.

Cette forêt, où deux secteurs sont classés ZNIEFF (Zones Naturelles d’Intérêt Écologique Faunistique et Floristique), doit donc accueillir une ferme éolienne mais aussi être exploitée pour son bois d’œuvre ou de chauffe. « Le massif forestier continue ce faisant à jouer son rôle de puits de carbone, de réservoir de biodiversité et de ressource en bois d’œuvre, de construction, et de chauffage », conclut sans sourciller le résumé non-technique de l’étude d’impact.

L’installation des 16 ou 17 éoliennes implique le défrichement de plus de 11 hectares. Les associations Bretagne Vivante et le Groupe mammologique breton (GMB) ont fait front commun lors de l’enquête publique afin de dénoncer l’atteinte que ce déboisement représenterait à l’encontre de plusieurs espèces protégées, notamment des chauves-souris. Outre les chiroptères, la destruction de cet habitat pourrait nuire à des populations d’oiseaux et d’amphibiens.

Actuellement, la forêt est constituée de deux tiers de résineux et d’un tiers de feuillus. « Elle s’est beaucoup artificialisée au fil du temps, déclarait Xavier Grenier, responsable du CRPF (Centre régional de la propriété forestière) à Rennes, au journal Ouest-France en 2007, mais elle reste remarquable à cause de sa taille et de la richesse de sa faune. »

« Compensation » : sophisme et pantalonnade

Un projet de développement industriel est encore une fois promu sous couvert de la lutte contre le changement climatique. Et la « compensation » qui devait être un ultime recours pour la construction d’infrastructures, après en avoir « évité » et « réduit » les impacts, devient un faire-valoir pour les porteurs de projet.

La démarche d’évitement est en fait inexistante, parce que d’emblée, il a été choisi de mener le projet dans un lieu à fort enjeu environnemental.

Logo du géant du négoce Louis-Dreyfus

Dans la forêt de Lanouée, les mesures compensatoires prévues sont de deux ordres : la recréation de milieux et la gestion forestière. Dans le premier cas il s’agit de reboiser douze hectares, en lisière et à l’intérieur de la forêt. Mais « sur des terrains dont les caractéristiques écologiques sont mal connues » et avec « un temps de résilience important », comme l’ont fait remarquer les associations environnementales.

« La démarche d’évitement relève ici d’un inadmissible sophisme où rien n’a été fait pour imaginer sortir les éoliennes de la forêt », constate le juriste de Bretagne Vivante, Romain Écorchard.

L’amélioration de la gestion forestière semble quant à elle relever de la pantalonnade puisqu’elle fait déjà partie des engagements de l’exploitant à travers le programme de labellisation des ressources forestières PEFC.

Par ailleurs, l’absence de données de référence sur la gestion antérieure de ce massif et le refus du propriétaire actuel de transmettre son plan de gestion aux associations ne permettent pas d’évaluer cette amélioration supposée.

Létude d’impact a été menée par Biotope, bureau d’étude déjà vivement critiqué pour ses approximations et l’inefficacité de sa méthode compensatoire dans le dossier d’impact environnemental du projet d’aéroport du Grand Ouest. Ce sont les modes de calculs remis en cause par les experts à Notre-Dame-des-Landes qui sont ici froidement proposés.

Une justice qui passe trop tard

En dépit des avis négatifs de la commission faune du CNPN (Conseil national de la protection de la nature) et du CSRPN (Conseil Scientifique Régional du Patrimoine Naturel), les demandes de permis de construire, de défricher et d’exploiter une ferme éolienne ont reçu un avis favorable de la commissaire enquêteur et les permis ont été accordés en février 2014 par le préfet. Les associations de protection des paysages ont déposé un recours contre les permis de construire tandis que Bretagne Vivante et le GMB ont déposé un recours contre l’autorisation d’exploiter en août 2014.

Le dossier de dérogation concernant la destruction des espèces protégées n’a été mis à disposition du public qu’au mois de janvier 2015. Le GMB et Bretagne Vivante se sont efforcés d’émettre un avis solide dans le court délai imparti mais la demande de référé en suspension a été rejetée le 5 mars. Le projet de parc éolien « va créer un impact irréversible sur les populations d’espèces protégées avant même que nous puissions faire quoi que ce soit pour faire valoir nos droits, regrette Thierry Amor, secrétaire général de l’association Bretagne Vivante, dans un communiqué du 23 février. C’est un véritable camouflet pour la démocratie, qui conduira à un massacre programmé pour une partie de la biodiversité de la forêt de Lanouée. Bien que nous soyons favorables au développement des éoliennes, nous affirmons que celles-ci doivent absolument éviter les zones à fort enjeu écologique. »

Affiche du permis de défricher ©Bretagne Vivante

L’association envisage encore un recours mais le porteur de projet s’est engouffré dans cette fenêtre de tir et a démarré le déboisement le 16 février suite à une autorisation obtenue le 4 février. Les travaux n’auraient en fait démarré que très partiellement forçant les associations à brûler leurs meilleures cartes juridiques. Les grands travaux ne commenceraient qu’en fin d’été… en toute sérénité pour Louis-Dreyfus.

Si le recours croissant des associations à la justice a permis des gagner des batailles devant les tribunaux, il ne doit pas se substituer totalement à des actions de terrain.

Les aménageurs ont en effet appris à tourner les délais à leur avantage et à profiter de créneaux resserrés pour lancer leurs travaux, ne laissant pas aux associations l’opportunité de réagir sur le plan juridique ou ne leur laissant pas d’autre choix que d’épuiser, dans l’urgence, les recours possibles. Ne resteraient-ils que les « zadistes » pour bloquer des projets mettant à mal la protection de l’environnement ? De fait, en l’absence d’occupation sur le terrain, la justice arrive souvent après les destructions.

À Lanouée, un industriel a réussi, encore une fois, à couper les arbres sous le pied des naturalistes qui n’ont pas la force de frappe pour contrer la machine administrative et judiciaire parfaitement maitrisée par les grands groupes. Ces dérives sont d’autant plus inquiétantes que les projets d’aménagements seront bientôt encore plus facilités par la loi Macron.

EN CORSE, L’ÉTAT FERME LES YEUX SUR LE BÉTONNAGE DU LITTORAL

Reporterre – le 14 juin 2017 :

Sur l’arton12467-22605île de Beauté, projets hôteliers, résidences secondaires ou établissements de luxe s’affranchissent souvent des règles d’urbanisme, sans que l’État intervienne. Des associations, comme U Levante, bataillent pour faire respecter la loi et protéger le littoral et les terres agricoles du béton.

 

Ce n’est pas une question anodine qui a été posée le 14 février dernier par Cécile Duflot au Premier ministre. « Enclave de non-droit », « mafias », « folie spéculative », « urbanisation anarchique et incontrôlée » : les mots étaient forts et l’alors députée écologiste n’a pas hésité à mettre en cause les élus et préfets coupables, selon elle, de « complaisance dans l’interprétation du droit ». En cause : les permis de construire et les plans locaux d’urbanisme (PLU), dont un grand nombre ne respectent pas la loi sur la protection du littoral, le Padduc (Plan d’aménagement et développement durable de la Corse) ou les zones agricoles et naturelles à protéger. « Ce n’est pas une ingérence de “pinzutu” [sobriquet donné aux Français du continent] mais la défense de l’intérêt commun et ma responsabilité d’écologiste qui m’ont poussée à poser cette question », explique la députée de Paris.

C’est aussi une manière de soutenir l’association de protection de l’environnement U Levante, très active en Corse, dont deux dirigeants ont été victimes, fin 2016, d’attentats contre leurs biens personnels. « Ce sont ces attentats qui nous ont incités à interpeller le gouvernement sur la problématique grave de la spéculation immobilière », dit Lisandru Plasenzotti, membre de la direction d’U Levante. Les « défaillances dans l’application des règles de droit par les services de l’État », comme l’écrit la députée, ce sont « par exemple le fait d’accorder des permis de construire totalement illégaux dans des zones protégées, illustre Lisandru Plasenzotti. Les préfets, qui en sont souvent avertis, ne daignent pas toujours intervenir ou le font très tardivement ».

Ces constructions, à Rondinara, en Corse-du-Sud, ont dû être détruites.

L’association assigne régulièrement en justice ces PLU non conformes à la loi : le tribunal administratif lui donne à chaque fois raison. En avril, U Levante a également remporté une victoire moins courante : elle a fait condamner pour faute l’ancien préfet de Corse du Sud, Stéphane Bouillon, pour des permis de construire illégaux accordés dans la commune de Coti-Chiavari, sur la côte très prisée entre Porticcio et Propriano.

« Un grand nombre de personnalités séjournent régulièrement à Murtoli »

Ce n’est pas la première fois que l’association a maille à partir avec la préfecture. En juillet 2016, ses militants ont eu une drôle de surprise en recevant de la sous-préfecture de Sartène un courrier indiquant que l’État retirait son recours contre un permis de construire accordé au domaine de Murtoli, un établissement de très grand luxe dont Nicolas Sarkozy, entre autres, est un habitué.

L’épisode est raconté en détail dans l’ouvrage de la journaliste Hélène Constanty, Corse, l’étreinte mafieuse (éd.Fayard) : « Murtoli est une forteresse, les associations ont du mal à savoir ce qui s’y passe, dit-elle. En 2016, pour la première fois, les services de l’État ont décidé d’attaquer les propriétaires pour une construction qui n’était pas de nature agricole, contrairement à ce qui était prétendu. L’avocat d’U Levante a rejoint la procédure et son dossier bien nourri devait appuyer celui, assez faible, des services de l’État. Mais, dans les heures qui ont suivi la réunion durant laquelle l’avocat de l’association a présenté son dossier d’accusation à la préfecture, l’État s’est désisté purement et simplement de son recours. »

La plage d’Arone, dans la commune de Piana.

Ni l’association ni la journaliste n’ont réussi à obtenir une explication de la part de la sous-préfète de Sartène. « Elle était en très bons termes avec le propriétaire de Murtoli », affirme Hélène Constanty. « Un grand nombre de personnalités séjournent régulièrement à Murtoli : des chefs d’entreprise, des membres du gouvernement, des représentants politiques de premier plan… Alors, ils se rendent des services, comme ça s’est toujours fait. On a sous les yeux un système qui s’apparente à une société mafieuse classique, avec des liens entre le monde de l’économie et les représentants de l’État », estime Lisandru Plasenzotti.

« L’État, qui subit depuis des années des réductions d’effectifs, n’a plus les moyens d’assurer le contrôle »

Du côté de la préfecture de Corse-du-Sud, ces accusations n’ébranlent pas Bernard Schmeltz, représentant de l’État en Corse depuis un an. Si la période de réserve due aux élections empêche le nouveau préfet de Corse de nous répondre, il nous a bien été précisé que la préfecture « ne souscrit pas aux propos d’U Levante ». Dans une interview accordée en mars dernier au site Corsenetinfos, Bernard Schmeltz affirmait : « Ma ligne de conduite est d’appliquer la loi, de faire preuve de pragmatisme et de rester étanche à toutes formes de pression. Si les processus juridiques à l’œuvre, auxquels participait l’État, n’ont pas permis d’endiguer le mitage de l’espace et le grignotage progressif des espaces agricoles, ce n’est pas la conséquence de petits arrangements ou de connivence. C’est juste qu’à l’époque, on n’avait pas le même niveau de conscience et on n’appliquait pas, avec la même vigilance et la même notion d’urgence, les règles d’environnement. » Et de laisser à la justice la charge de recaler les PLU illégaux : « Si, lors d’un contrôle de légalité [d’un PLU], nous relevons des éléments susceptibles de donner lieu au constat d’une infraction pénale, nous les transmettons, comme le prévoit l’article 40 du Code pénal, au Parquet, qui décide s’il poursuit ou pas. […] Les services de l’État, qui subissent, depuis des années, des réductions d’effectifs, n’ont plus les moyens d’assurer le contrôle ou l’instruction au cas par cas de tous les permis de construire délivrés en Corse. »

Le Plan local d’urbanisme de la commune de Piana autour de la plage d’Arone.

Ce sont donc les associations qui s’en chargent, au risque d’y laisser des plumes. Après l’attentat contre la maison d’une dirigeante d’U Levante à Sotta en novembre dernier, l’association a reçu une large vague de soutiens, y compris de la part des élus nationalistes Gilles Simeoni et Jean-Guy Talamoni. « Le soutien des élus de Corse est un fait, mais nous attendons de leur part des changements radicaux qui tardent à venir, regrette Lisandru Plasenzotti. On parle d’un statut de résident pour limiter la spéculation immobilière en Corse, mais il y a des choses concrètes qui pourraient déjà être faites et qui ne le sont pas. Nous restons les seuls garde-fous de ces dérives. »

Et pendant que les préfets, les élus, la justice et les associations bataillent, le littoral corse et les espaces agricoles reculent. Piana, Cargèse, Canari… autant de sites naturels remarquables que la construction de résidences secondaires menace de transformer en villages fantômes durant dix mois de l’année. « L’enjeu va au-delà de la simple protection de l’environnement : ils doivent traduire un choix de société. Car tous les voyants sont au rouge, de la fuite en avant spéculative, des périphériques lotissements dortoirs, des pharaoniques centres commerciaux remplaçant une agriculture de proximité, des stations balnéaires sans âme, du consumérisme à son apogée jusqu’à la profanation de sanctuaires tels que A Rundinara [un site naturel non constructible près de Bonifacio] », s’indigne U Levante.

La Corse sauvage, jusqu’à quand ?

AVIS DE TEMPÊTE SUR LA « PRIVATISATION » DE LA PLAGE DE LA BAULE

LE MONDE | 19.05.2017 : 

L’Etat a signé un contrat avec Veolia confiant au groupe la gestion de « la plus belle baie d’Europe ». Les commerçants de la plage se sont mutinés.

5130563_6_24fd_2017-05-19-9dd1423-30760-1lxcigp-a1ffidlsor_ec9b006e851c9c26319c06330db7c4cb(…) un passant pressé prévient d’une « révolution qui gronde », et devant le restaurant de plage l’Ipanema, une cliente volubile promet déjà de « creuser des tranchées ».

Mais d’où vient ce parfum d’insurrection qui flotte dans la coquette station balnéaire de La Baule, dans la Loire-Atlantique ? On a touché à ses 5,4 kilomètres de sable fin. Dans cette municipalité de 16 000 habitants, vantée par les brochures comme étant « la plus belle baie d’Europe », il n’en fallait pas plus pour provoquer une levée de boucliers.

Un décret à retardement

En décembre 2016, l’État, propriétaire du domaine maritime, a signé un contrat avec Veolia confiant au groupe la gestion de la plage pour une durée de douze ans. En échange d’une redevance d’un montant initial de 150 000 euros, prévue pour augmenter jusqu’à 177 000 euros, le groupe spécialisé dans les services aux collectivités a ainsi obtenu la responsabilité des installations publiques de la plage, mais aussi l’exploitation des trente-cinq établissements sis sur le rivage. Une décision qui a provoqué la colère de ces commerçants, qui ont tôt fait de dénoncer une « privatisation » de l’une des plus célèbres plages de la façade atlantique.

Ce bouleversement n’est pourtant pas arrivé avec la dernière marée. Il couve depuis le 26 mai 2006, date de promulgation du décret plage. A l’origine de ce texte, la volonté des pouvoirs publics de « protéger le littoral » en encadrant plus strictement la physionomie des plages, et de ses commerces attenants. Eviter de voir se reproduire à l’infini ces plages de la Côte d’Azur où plus de quarante restaurants se partagent moins de deux kilomètres de plage, scindés en autant de zones privées délimitées par des barrières et calicots de couleurs. (…)

« Une seule source de financement : les exploitants »

Dès lors, l’Etat, responsable de son littoral, procède à un appel d’offres dans le cadre d’une délégation provisoire de service public. La multinationale Veolia sera la seule à présenter un projet, signé à la fin de 2016, et lance un appel à candidatures pour les concessions, à rendre le 20 juin. (…)

Un surcoût d’autant moins justifié, pour M. Durand-Raucher, qu’il est en partie dû à la « gourmandise de l’Etat ». A titre de comparaison, la ville voisine de Pornichet, qui a conservé le contrôle de ses trois plages, verse 33 330 euros par an de redevance. « Dans le cas de La Baule, parce qu’il est possible de se goinfrer sur le privé, la redevance reviendrait à plus de 150 000 euros », rappelle le président de l’association, qui s’insurge : « L’objectif d’une entreprise comme Veolia c’est de faire du pognon, pas de veiller à garder l’esprit de station familiale qu’on a ici. »

« Perte d’identité »

De fait, l’appel à candidatures lancé par Veolia promet des changements dans le paysage baulois. Les établissements, bien plus vastes, pourront s’étendre sur quarante mètres jusqu’à l’océan, en soulignant leur espace par des « délimitations légères », de type cordons ou barrières. Une charte architecturale est également imposée aux bâtiments, dans un nuancier de bleu et une forme cubique.

En outre, une large partie des 750 tentes à rayures bleues et blanches, immortalisées dans le Lola de Jacques Demy, en 1961, devront être démontées. « Les structures iront quasiment jusqu’à l’eau, doublant les espaces de plage privatifs », souligne le restaurateur Nicolas Appert, qui dénonce une « perte d’identité », avec des « bâtiments uniformisés ». « On devient des franchisés Veolia », conclut-il.

De son côté, Veolia s’insurge contre ces critiques et promet de « rendre cette plage plus sûre, plus attractive, plus moderne et plus respectueuse de l’environnement, en investissant 650 000 euros pour tout remettre aux normes ».

La mairie se réengage

Mais devant le tollé provoqué par ces changements annoncés, la municipalité, qui réfute pourtant le terme de « privatisation », a décidé de modifier sa stratégie, mercredi 17 mai, en proposant la création d’une société d’économie mixte. Une solution accueillie favorablement par Veolia, qui s’est dit « prêt à entrer en discussion avec les services de l’Etat et les services de la mairie ».

Ce partenariat permettrait à la ville de « concourir aux dépenses de gestion, aux investissements et de limiter raisonnablement les hausses de redevance des exploitants, tout en recherchant l’équilibre économique et en réservant à Veolia une part d’activité dans laquelle elle souhaite s’investir », souligne, dans son communiqué, le maire.

Pour Laurence Jégouzo, avocate de l’association des commerçants de La Baule, cette volte-face de la municipalité constitue « plutôt une bonne nouvelle, car c’est une reconnaissance qu’il y avait un problème majeur ». Mais les modalités exactes de ce partenariat restent encore floues, et les conséquences sur le paysage baulois, inconnues. Pour maintenir la pression, l’association de défense des commerçants a appelé à une manifestation, samedi 27 mai.